Lettre au ministre Virani concernant la Loi sur l'équité salariale

Main Image
Image
Trois symboles, un signe égal, un signe dollar et un point d'exclamation, signifiant Equal Pay Now (l'égalité salariale maintenant)
Partager

ENVOYÉ PAR COURRIEL

L’honorable Arif Virani, C.P., député
Ministre de la Justice et Procureur général du Canada
@email     

Objet : Loi sur l’équité salariale

Monsieur le Ministre,

Je vous écris aujourd’hui pour demander que des ressources supplémentaires substantielles soient allouées à la Commission de l’équité salariale afin de garantir que l’organisation soit pleinement capable de remplir son mandat d’administration et d’application de la Loi sur l’équité salariale, de résoudre les différends en temps opportun et d’assurer le respect de la loi. 

Comme vous le savez, la date limite du 3 septembre pour la mise en place de plans d’équité salariale par les employeurs sous réglementation fédérale approche à grands pas. Notre expérience dans les milieux de travail représentés par Unifor suggère qu’étant donné le rythme auquel les comités d’équité salariale progressent, il sera difficile, voire impossible, pour de nombreux employeurs soumis à la réglementation fédérale, de respecter leurs obligations avant cette échéance. Le non-respect de ces responsabilités a des conséquences pour de nombreux milieux de travail, en effet, il perpétue les inégalités auxquelles sont confrontées de nombreuses personnes dans les catégories d’emploi à prédominance féminine, entraîne des retards dans les augmentations de salaire et sape les objectifs mêmes de la Loi sur l’équité salariale.

Unifor représente 320 000 travailleuses et travailleurs partout au pays, dont beaucoup sont employés dans des milieux de travail sous réglementation fédérale. En fait, notre syndicat négocie avec plus de 190 employeurs sous réglementation fédérale. À ce jour, nous n’avons connaissance que de six employeurs qui ont respecté la récente échéance du 2 juillet pour présenter un projet de plan d’équité salariale afin de recueillir les commentaires des employées et employés ainsi que de leurs représentantes et représentants. Sur ces six employeurs, trois ont conclu qu’aucun ajustement en vertu de l’équité salariale n’était nécessaire, et deux autres manipulent, à notre avis, le processus à leur avantage en « jouant » avec les fourchettes de la méthode de la moyenne égale pour minimiser les augmentations de la rémunération totale au détriment de l’équité salariale. Tout en reconnaissant que certains plans d’équité salariale nécessiteront des ajustements moins importants que d’autres, nous nous interrogeons sur les situations dans lesquelles un plan n’exige aucun ajustement en vertu de l’équité salariale. 

Les membres d’Unifor qui siègent à des comités d’équité salariale et les experts internes d’Unifor ont signalé des comportements problématiques de la part d’employeurs qui, au mieux, font preuve d’un profond manque de compréhension de leurs responsabilités en vertu de la Loi, ou, au pire, ignorent intentionnellement la Loi. Les employeurs qui n’ont pas alloué le temps et les ressources nécessaires pour respecter le délai fixé par la Loi pour la publication d’un projet de plan sont souvent les plus mauvais élèves, faisant preuve d’indifférence, d’intransigeance ou des deux à la fois. Après avoir discuté de ces questions avec d’autres représentantes et représentants des travailleuses et travailleurs, il est clair pour nous que les difficultés décrites dans cette lettre ne sont pas propres aux entreprises représentées par Unifor. 

De nombreux employeurs ont refusé de divulguer la rémunération de leurs employées et employés non syndiqués et/ou de leurs gestionnaires, créant ainsi des obstacles inutiles à l’équité salariale. D’autres ignorent les demandes de rencontre du syndicat visant à mettre en place un comité, ce qui constitue l’une des premières étapes. D’autres refusent de divulguer les renseignements nécessaires aux représentantes et représentants des employées et employés au sein du comité et/ou refusent de fournir aux membres du comité des copies des documents leur permettant d’examiner et d’évaluer correctement les descriptions de poste, les classifications et les fourchettes. Certains employeurs ignorent les exigences relatives aux comités en refusant d’autoriser la participation de représentantes et représentants syndicaux spécifiques, en exigeant de manière déraisonnable des ententes de non-divulgation excessivement larges qui menacent de mesures disciplinaires et de licenciement, et en tentant d’intimider les membres de comités pour qu’ils acceptent des projets de plans sans s’engager dans les processus prescrits par la Loi.

De nombreux employeurs ont mal compris le rôle des consultantes et consultants en matière d’équité salariale et certains tentent de bloquer l’engagement véritable des comités d’équité salariale. Un certain nombre de membres d’Unifor siégeant dans des comités d’équité salariale ont signalé que leurs employeurs se sont présentés à la première réunion du comité d’équité salariale simplement pour présenter un plan d’équité salariale entièrement développé et achevé, préparé par une consultante ou un consultant, comme un fait accompli. Dans certains cas, les représentantes et représentants des employées et employés ont fait l’objet d’une résistance constante et ont été exclus du processus d’équité salariale imposé par la loi. 

Bien que la Commission d’équité salariale et ses représentantes et représentants aient travaillé avec professionnalisme et diligence pour aider les parties, y compris notre syndicat, la procédure de plainte est engorgée. Il est évident pour nous que les ressources consacrées à la résolution des litiges sont insuffisantes. Récemment, il a fallu quatre mois pour recevoir une décision de la Commission de l’équité salariale après avoir déposé une plainte concernant les plans multiples d’un employeur. En raison du retard dans l’obtention d’une décision, l’entreprise a eu besoin d’une prolongation pour achever le processus d’équité salariale. 

Dans le rapport annuel 2021-2022, le commissaire à l’équité salariale a indiqué que l’unité équité salariale disposait de 24 personnes réparties entre quatre unités opérationnelles, à savoir la sensibilisation et la recherche, les services d’accueil et la mise en œuvre technique, les outils et la formation, ainsi que la conformité et l’application. Le rapport annuel 2023-2024 ne fait pas état d’une augmentation du personnel, mais indique bel et bien une augmentation du nombre de demandes de renseignements, de plaintes et de litiges. La Loi sur l’équité salariale s’applique à plus de 5 000 employeurs sous réglementation fédérale, soit 1,4 million d’employées et employés. Les 24 représentantes et représentants seront chargés de veiller à ce que ces 5 000 employeurs disposent de plans d’équité salariale. Les ressources actuellement allouées à la Commission ne sont pas suffisantes pour mener à bien cette tâche.

C’est en raison des difficultés auxquels nous avons fait face pour faire respecter les exigences de la Loi sur l’équité salariale que notre syndicat a été poussé à vous écrire. Nous espérons que les expériences décrites dans cette lettre contribueront à illustrer la nécessité d’allouer rapidement des ressources importantes à l’équipe qui aide les parties à atteindre les objectifs fixés.

Unifor estime que la réalisation de l’équité salariale dans le milieu de travail fait partie intégrante de la lutte pour la justice et l’égalité au travail. Je vous invite à envisager d’allouer des ressources supplémentaires pour atteindre les objectifs fixés dans la Loi sur l’équité salariale et dans votre mandat, et je vous invite à communiquer avec mon bureau si vous souhaitez obtenir plus de renseignements sur l’expérience d’Unifor dans le cadre du processus d’équité salariale à ce jour. 

Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, mes sincères salutations.            

Lana Payne        
Présidente nationale

cc : L’Honorable Chrystia Freeland, C.P., députée, vice-première ministre et ministre des Finances; l’honorable Steve MacKinnon, C.P., député, ministre du Travail et des Aînés; Lori Straznicky, commissaire à l’équité salariale.