Observations d’Unifor devant le Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes

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Une femme est assise à un bureau et porte des écouteurs.
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Témoignage de Lana Payne, présidente nationale
Le 30 mai 2024

Bon après-midi, Madame la Présidente ainsi que toutes et tous les membres du comité,

Je suis Lana Payne, présidente nationale d’Unifor, le plus grand syndicat du secteur privé au Canada représentant 320 000 travailleuses et travailleurs partout au pays. Je suis accompagnée aujourd’hui d’Angelo DiCaro, directeur du Service de la recherche d’Unifor.

Je vous remercie d’abord de l’invitation, au nom de nos membres, dont plusieurs travaillent dans des secteurs touchés par le commerce.

Vous me permettrez de commencer en disant que la politique commerciale du Canada est un aspect clé de la stratégie industrielle élargie de notre pays. 

Malheureusement, depuis la mise en place de l’ALENA, le Canada a souffert d’un manque d’ambition en matière de développement industriel. En raison de ce manque de vision, les gouvernements se sont engagés aveuglément dans des accords commerciaux inutiles, en ignorant et en rejetant la voix et les préoccupations des travailleuses et travailleurs.

Cette situation a toutefois changé lors de la renégociation de l’ALENA. Ce gouvernement mérite notre reconnaissance, pas pour avoir procédé au sauvetage d’un accord qui a causé d’immenses dommages aux travailleuses et travailleurs, mais plutôt pour avoir présenté une vision économique progressiste courageuse afin d’appuyer sa stratégie de négociation, en mettant à l’avant-plan la voix des travailleuses et travailleurs. Cette nouvelle approche qui tranchait avec le passé a été accueillie très favorablement.  

L’étude que nous avons entreprise en vue de l’examen de l’accord ACEUM prévu tous les six ans est nécessaire et arrive au moment opportun. 

Les dirigeantes et dirigeants américains ne mâchent pas leurs mots lorsqu’ils conseillent de ne pas « nous asseoir sur nos lauriers » en vue de ces pourparlers. 

Nous devons nous attendre à ce que les Américains mettent sur la table leurs reproches de longue date, que ce soit en ce qui concerne la gestion de l’offre dans l’industrie laitière ou le commerce numérique au Canada. Le Bureau du représentant américain au commerce a déjà tenu des consultations sur le commerce dans le secteur automobile régi par l’ACEUM. 

Le Canada ne peut s’engager dans cet examen avec une approche défensive.

Nous devons rappeler aux Américains à quel point nos économies industrielles sont aujourd’hui interdépendantes, mais nous ne devons pas non plus craindre d’exprimer nos propres préoccupations. 

Il y a des écarts évidents entre l’ACEUM et nos relations commerciales trinationales pour lesquels nous pouvons chercher des solutions dans le cadre de cet examen. Voici quelques-uns de ces écarts qui représentent des aspects prioritaires pour Unifor.

  • Dans le secteur de l’aluminium, la surveillance des importations qui contournent nos mesures de décarbonisation et minent nos efforts en ce sens doit être renforcée. L’aluminium est un métal stratégique qui devrait bénéficier des mêmes exigences de transformation que celles qui s’appliquent à l’acier en ce qui concerne les règles d’origine dans le secteur de l’automobile.
  • Dans le secteur forestier, le conflit du bois d’œuvre résineux s’éternise depuis 8 ans faisant en sorte que les entreprises canadiennes doivent payer des droits compensatoires injustifiés. Cette industrie doit composer avec des obstacles majeurs, notamment la fermeture des usines et les pertes d’emplois. Ces sanctions commerciales exercent donc une pression supplémentaire sur une industrie déjà en difficulté. Ces sanctions doivent être éliminées.
  • Pour ce qui est du droit du travail, il reste beaucoup à faire pour faire le ménage dans le système ouvrier mexicain. Le mécanisme de réaction rapide prévu en vertu de l’ACEUM aide à remédier aux infractions relatives au droit du travail tout en exerçant un pouvoir dissuasif. Il contribue également au renouvellement des syndicats démocratique au Mexique. Ce mécanisme fonctionne et doit être étendu, y compris à des milieux de travail aux États-Unis et au Canada. Voici pourquoi : 

  • Un vote récent qui a eu lieu dans une usine Mercedes de l’Alabama a été entaché par des menaces et de l’intimidation à l’égard des travailleuses et travailleurs, des comportements qui rappellent ce dont nous avons été témoins dans les usines de fabrication d’automobiles au Mexique. Le Canada doit exiger une enquête en profondeur sur ce comportement qui fausse les relations commerciales, en particulier compte tenu du fait que le Canada dispose d’une entente pour l’approvisionnement de Mercedes en lithium, cobalt et autres minéraux essentiels.  Le Canada devrait également signaler clairement aux États-Unis son intention de renégocier sa proposition consistant à considérer les lois de « droit au travail » comme étant une infraction au titre du chapitre de l’ACEUM sur le travail.  

  • Dans le secteur de l’automobile, nous avons l’occasion de lier nos stratégies commerciales et industrielles.  Les règles sur le contenu en main-d’œuvre étaient un autre ajout aux règles sur l’accès au marché et étaient fixées à 16 $ US l’heure en 2020, mais elles n’ont pas été modifiées depuis. 
  • Ces tarifs de main-d’œuvre doivent ajustés tout comme la liste actuelle de l’ACEUM des pièces fondamentales de façon à tenir compte des nouvelles technologies associées aux véhicules électriques, comme les moteurs électriques et les cathodes. 
  • Le Canada doit discuter avec les États-Unis de la hausse des mesures tarifaires de l’OMC sur les véhicules légers, qui sont actuellement fixées à 2,5 $, ce qui est loin d’être suffisant pour assurer la conformité avec les règles complexes d’origine de l’ACEUM. 

  • Le Canada doit aussi prendre au sérieux la menace relative à l’importation de véhicules électriques par les Chinois qui subventionnent cette industrie par le biais du travail forcé, des subventions excessives, le vol de technologies et d’autres moyens. Nous devons demeurer vigilants pour nous protéger contre les transbordements et nous préparer à prendre les mesures qui s’imposent, conjointement avec les États-Unis. 

Unifor continuera de surveiller l’avancement de l’examen et nous demeurons à votre disposition pour discuter plus en détail sur le sujet. Nous espérons avoir répondu à toutes vos questions. 

Je vous remercie.